Des vestiges importants, datant du Paléolithique jusqu’à l’Age du Fer, apportent sans équivoque la preuve d’un peuplement continu de l’espace carpato-danubien-pontique. L’Age de Pierre (6 400 – 3 400 av. J.-C.), et particulièrement sa dernière phase - l’Enéolithique, laisse à la Roumanie d’aujourd’hui un héritage inestimable à travers ses cultures, dont celle de Cucuteni qui se démarque par sa céramique peinte d’une grande valeur artistique. L’Age de Bronze (3 400 – 1 200 av. J.-C.) amène avec lui la mobilité et l’échange qui remplacent le sédentarisme spécifique à la période précédente. Ceci facilite l’installation progressive sur ces territoires d’un peuple d’origine thrace : les Gèto-Daces.
Connus dès le VIème siècle av. J.-C. par les collons grecs de la Mer Noire pour leurs qualités de commerçants, les Gèto-Daces se font plus tard connaitre des romains par leur attitude guerrière. Perpétrant de violentes attaques sous la bannière du loup-dragon, ils représentent une menace aux yeux de Rome, raison pour laquelle Jules César envisagea un temps une campagne militaire contre leur puissant roi Burebista. Ce dernier sera, tout comme César, victime d’un complot entrainant sa mort. Suite à cela, le royaume dace cède aux divisions tandis que naît l’Empire Romain (27 av. J.-C. – 476 apr. J.-C). Cette dynamique va être déterminante pour la suite de l’Histoire.
Suite aux campagnes militaires menées entre 101 – 102 et 105 – 106 par l’Empereur Trajan contre le roi Décébale, le royaume dace finit par être conquis et transformé en partie dans la province romaine de Dacia Felix. Une autre partie est intégrée à la province romaine de Moesia Inferior tandis que le restant du territoire réuni les daces libres. La retraite de l’administration ainsi que des légions romaines au sud du Danube, ordonnée par Aurélien en 271, facilite par la suite l’établissement sur le territoire de la Roumanie actuelle des peuples migrateurs dont, à partir du VIème siècle, les slaves. Assimilés par les daco-romains, ceux-ci contribuent au fil des siècles à la genèse du peuple roumain.
Entre 896 et 900, les hongrois pénètrent dans la plaine de Pannonie et mènent des campagnes expansionnistes vers l’Ouest. Arrêtés en 955 par Otto Ier, leur attention se tourne vers le plateau transylvanien, région qui se voit annexée progressivement au royaume de Hongrie (1000 – 1526). Les hongrois consolident leur position en Transylvanie entre les XIIème et XIIIème siècles par la colonisation du territoire avec des magyars, des sicules (peuple turco-magyare) et des saxons (peuples d’origine germanique). Ces mesures ont pour but la défense du territoire conquis ainsi que son développement économique. Des villes comme Brasov, Sibiu et Sighisoara (entre autres) témoignent aujourd’hui encore de ce passé florissant.
Face à la tendance expansionniste du Royaume de Hongrie au sud des Carpates, les petits féodaux d’origines valaques cherchent à rompre leurs relations de vassalité avec le roi magyar. Ainsi, 1330 marque la naissance du voïvodat de Valachie sous le règne de Basarab Ier (1310 – 1352). Il englobe la Munténie et l'Olténie et, entre 1390 et 1418, la Dobrogée lui est annexée suite à la victoire de Mircea l’Ancien (1386 – 1418) sur l’Empire Ottoman (1299 – 1922). Hélas, après la mort du voïvode, la Valachie finit par devoir payer tribut à la Sublime Porte pour pouvoir garder son autonomie interne pendant que la Dobrogée est transformée pendant presque quatre siècles et demi en province ottomane.
La fondation par Bogdan Ier (1359 – 1365) du voïvodat moldave (représentée aujourd’hui par la Moldavie, la Bucovine, la République de Moldavie et quelques territoires en Ukraine) devrait être mise dans le contexte de la résistance contre la suzeraineté magyare même si la légende du taureau chassé par Dragos (1351 – 1353) et par sa chienne Molda (d’où le nom) est à jamais gravée sur son blason. Pendant le règne d’Etienne le Grand (1457 – 1504), la Moldavie parvient à préserver son indépendance face à l’Empire Ottoman, s'érigeant après la chute de Constantinople en 1453 en bastion du Christianisme en Europe. Elle deviendra finalement elle aussi vassale de la Porte en 1538.
Après la conquête ottomane de la Hongrie en 1526, les voïvodes roumains sont nommés directement par le sultan parmi les nobles locaux. La position est octroyée au plus offrant. C’est dans ce contexte que Michel le Brave (1593 – 1601) accède au trône de la Valachie, mais il n’en reste pas là. Dans l’intention de mettre fin à l’oppression ottomane, il conquiert la Transylvanie en 1599 puis la Moldavie en 1600, réunissant ainsi pour peu de temps les différentes entités de l’espace roumain sous un même sceptre. Sans avoir un caractère politique, l’unification des trois principautés sème les graines de la conscience nationale roumaine, qui se manifestera plus tard dans un contexte européen favorable.
Après la défaite de l’Empire Ottoman à Vienne en 1683, une autre puissance s’impose : la maison des Habsbourg. Ainsi, la principauté de Transylvanie (vassale de la Sublime Porte) passe en 1699 sous administration autrichienne directe. Le Crisana et le Maramures sont complètement intégrées dans le nouvel empire tandis que le Banat restera, lui, province ottomane jusqu’en 1716. La Moldavie et la Valachie, toujours sous allégeance ottomane, se voient imposer le régime phanariote comme solution contre l’ingérence russe et l’expansionnisme autrichien. Mais cette mesure n’épargnera pas à la Moldavie sa région nord qui, cédée par les turcs aux autrichiens, deviendra en 1774 l’actuelle Bucovine.
Suite au traité de paix russo-turc de 1812, la Moldavie se voit arracher également sa partie orientale, située dans le voisinage immédiat de l’Empire Russe (1721 – 1917). Devenue "goubernie" jusqu’en 1918, la Bessarabie est soumise à un long processus de russification, ce qui la différencie encore aujourd’hui des autres régions d’origine roumaine. Récupérée après la Première Guerre mondiale en tant que province de la « Grande Roumanie » (1918 – 1940) et ensuite perdue au profit de l’URSS (1922 – 1991) en tant qu’une de ses quinze républiques, l’ex-Bessarabie devient en 1991 un état indépendant sous le nom de République de Moldavie, mais sa société civile reste tiraillée entre l’Europe et la Russie.
L’étincelle de la révolution française de 1848 allume la flamme de la conscience nationale des peuples soumis. L’élite magyare exige la création d’un état national indépendant incluant la Transylvanie. Cette perspective incite les roumains de la région à prendre les armes au côté des autrichiens mais leur victoire se solde, étonnamment, par la création de l’Empire Austro-Hongrois (1867 – 1918) et la cession, dans le contexte de cette double monarchie, de la Transylvanie à la Hongrie. Au-delà des Carpates, la révolution a plutôt un caractère pétitionnaire, avec des insurrections en Valachie. Mais, malgré l’échec, l’éveil national roumain donne naissance au drapeau tricolore et au rêve de l’unification.
La guerre d’indépendance grecque (1821 – 1829) remet en question le régime phanariote imposé en 1711 à la Moldavie et en 1716 à la Valachie. Les deux régions regagnent ainsi, en 1821, le droit de présenter leur propre candidat au trône, à la place d’un gouverneur (initialement originaire de Phanar – le quartier grec de Constantinople) imposé par la Porte. En 1859, sous le regard des Grandes Puissances, les deux principautés danubiennes élisent, à quelques jours d’intervalle, le même candidat comme prince régnant de charge – le colonel moldave Alexandre Jean Cuza (1820 - 1873). Ce moment historique facilitera l'union politique de facto des deux principautés par l’établissement à Bucarest, en 1862, de leur premier gouvernement commun.
L'Union des Principautés de Valachie et de Moldavie est consolidée par le successeur de Cuza, le prince d’origine allemande Charles de Hohenzollern-Sigmaringen. En 1866, il est élu prince-souverain des Principautés Unies de Roumanie sous le nom de Carol Ier. La même année, la nouvelle construction politique est reconnue par la Porte comme un seul état : la « Principauté de Roumanie », tout en lui restant vassale. Sur plan interne, l’alternance au pouvoir entre les libéraux et les conservateur assure la stabilité politique propice à la modernisation. Quant à la Transylvanie, elle est intégrée en 1867 dans le royaume de Hongrie, ce qui y entraine (entre autres) l’annulation de la représentation politique éphémère de la population roumanophone.
En 1877 éclate une nouvelle guerre russo-turque. La Principauté de Roumanie s’allie à l’Empire Russe et prend les armes contre les ottomans. C’est pour la première fois depuis des siècles que les roumains s’affirment militairement. Avec une armée de 35 000 soldats, dont l’organisation avait été démarrée sous le règne de Cuza, Carol Ier fait pencher la balance en faveur de l’Empire Russe. En 1878, l’indépendance est enfin obtenue et reconnue. De plus, les deux tiers nord de la Dobroudja (sous occupation turque, avec de courtes pauses, depuis 1421), sont restituées à la Principauté de Roumanie qui, avec le couronnement de Carol Ier le 10 mai 1881, deviendra une monarchie constitutionnelle (1881 - 1937; 1944 - 1947).
Après deux ans de neutralité, le Royaume de Roumanie se rallie à l’Entente avec la promesse de pouvoir intégrer le territoire austro-hongrois à majorité roumanophone. Quelques mois avant la fin de la guerre, il se retrouve dans la situation de capituler. Mais le retour en force des alliés déterminent les roumains à reprendre les armes et ainsi à sortir victorieux de la guerre. Après d’âpres négociations à Versailles, le Royaume (réduit entre temps à la région de Moldavie) peut annexer les territoires rêvés ainsi que la Bessarabie, la révolution bolchevique ayant joué son rôle. L’Union, proclamée le 1 décembre 1918 (devenue en 1990 la Fête Nationale), sera scellée par le couronnement à Alba-Iulia, le 15 novembre 2022, des souverains bien-aimés Ferdinand et Maria.
Pendant l’entre-deux-guerres, la monarchie est sapée par la crise dynastique provoquée par le roi Carol II. Sous son règne, la « Grande Roumanie » doit céder au début de la Seconde Guerre mondiale la Bessarabie, le nord de la Bucovine, le nord de la Transylvanie (récupéré en 1947) et le sud de Dobroudja. Le roi abdique. Son régime autoritaire est remplacé par la dictature du général Antonescu qui s’allie en 1941 à l’Axe. En 1944, avec la reprise du pouvoir par le roi Michel Ier, la Roumanie passe du côté des Alliés tout en restant sous occupation soviétique. Le 30 décembre 1947, avec l’aide de l’Armée rouge, les communistes réalisent un coup d’état. La monarchie est remplacée par une république populaire.
La « stalinisation » de la société roumaine implique l’annihilation des structures existantes : toute opposition politique et intellectuelle est éliminée, l’agriculture est collectivisée tandis que l’industrialisation est forcée au profit des soviétiques. De plus, dans le cadre d’une intense politique de russification, les relations avec l’Occident sont interrompues, parallèlement avec la mise à l’écart des valeurs nationales. Le besoin de prendre ses distances par rapport à Moscou se voit satisfait par Nicolae Ceausescu (à la tête du parti communiste depuis 1965), élu président de la République socialiste de Roumanie en 1974. Celui-ci cherche à donner au communisme roumain une forme bien distincte de celui des soviétiques.
Le régime de Ceaușescu se fonde sur le culte de la personnalité. L’arbitraire despotique se manifeste dans tous les aspects de la vie. Des tensions s’accumulent et des émeutes éclatent sporadiquement: en 1977 la grève des mineurs de la Vallée de Jiu, en 1987 celle des ouvriers de Brașov. Et 1989 arriva. L’étincelle de la révolution jaillit le 16 décembre à Timișoara. L’effervescence s’étend jusqu’à Bucarest d’où, lors du discours de fin d’année, Nicolae et Elena Ceaușescu s’échappent en hélicoptère. Le couple présidentiel est arrêté et exécuté après un simulacre de procès trois jours plus tard, le 25 décembre. Ainsi, la révolte populaire se mue en coup d’état qui révèle de nombreuses convoitises pour le pouvoir.
Suite à la révolution de 1989, le pouvoir passe entre les mains de Ion Iliescu, l’opposant de Nicolae Ceaușescu au sein du Parti communiste. Il remporte la victoire lors des élections présidentielles de mai 1990 après une réinstauration ardue de la démocratie, marquée par des troubles sociaux majeurs tels que les « minériades ». Le retour à l’économie de marché et la réintégration politique et culturelle de la Roumanie dans l’espace européen occidental est un long processus qui demande des efforts considérables pour réduire l’écart de développement provoqué par le cours de son Histoire à partir de 1945. Aujourd’hui, elle a trouvé sa place géopolitique en tant que membre de l’Union européenne, depuis le 1er janvier 2007.