TRADITIONS

Roumanie Autrement

LES FÊTES D'HIVER : ENTRE SACRÉ ET PROFANE

Noël est, sans équivoque, l’une des plus grandes sources de joie pour les roumains de culte orthodoxe, qui représentent 89,45 % de la population (lors du dernier recensement réalisé en 2011). Le 25 décembre inaugure le cycle de douze jours des fêtes d’hiver. Cette période est marquée par une symbiose inédite et surprenante entre le sacré et le profane. Elle se conclut le 6 janvier, tout juste avant la fête de Saint-Jean Baptiste. 

D’une forte valeur spirituelle, Noël est également une exceptionnelle occasion de vivre le bonheur du partage et de l’accueil. Loin de la modernité, les ruelles des villages sont parsemées au réveillon et le jour de la fête par des groupes d’enfants aussi bien que d’adultes qui annoncent par leurs chants la joyeuse nouvelle de la Nativité. Les hôtes, soigneusement préparées pour la visite des colindători, les régalent avec générosité.

Entre Noël et la Saint-Basile, célébrée le 1er janvier, l’espace profane se transforme en une vraie scène de théâtre pour les rituels des masques artisanaux, qui déclenchent des transes et des états spirituels d’une grande charge énergétique. Protégés par l’anonymat des masques, leurs porteurs ont la conviction de chasser par leurs mouvements et leur bruit les mauvais esprits, purifiant ainsi la communauté dont ils font partie.

Dans le même registre des croyances pré-chrétiennes, les roumains célèbrent Plugușorul – une coutume séculaire qui évoque l’origine agraire et pastorale de ce peuple. Au réveillon du Nouvel An, les mêmes groupes d’enfants et d’adultes vont d’une maison à l’autre pour souhaiter l’abondance des récoltes et la santé, accompagnés du son des coups des fouets, des beuglements du buhai et des tintements des clochettes. 

La veille de Boboteaza, ou le baptême de Jésus-Christ, revêt également une forte connotation magique païenne, notamment la pratique prénuptiale qui permettrait aux filles en âge de se marier de voir en rêve leur "promis". Au rang des pratiques religieuses de la fête, la bénédiction de l’eau imprègne la conscience collective, car sa force purificatrice est considérée comme incontestable, même dans la sphère profane.

 

Crédit photos: Gabriel Motica